Mandats d’arrêts de la CPI : sur l’immunité de Benjamin Netanyahu, la France ment
27 nov 2024 Communiqué de la LDH
Parmi les diverses réactions :
Dans Ouest-France le 27 nov : La cheffe des Écologistes Marine Tondelier a qualifié de « honte » l’« immunité » dont bénéficie le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu en France malgré un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) qui le vise.
« La France se plie une fois de plus aux exigences de Benjamin Netanyahou en le choisissant lui plutôt que la justice internationale », a-t-elle dénoncé mercredi sur X. « Sûrement était-ce le “deal” pour que la France soit citée dans le communiqué d’annonce officiel du cessez-le-feu au Liban publié conjointement par la France et les États-Unis hier », dénonce-t-elle.
Dans sa prise de paroles devant le parlement européen à Strasbourg, Rima Hassan a dénoncé la trahison macroniste.
Johann Soufi * sur X : (cette info ne fait pas la promo de X mais les infos contenues sur le lien sont intéressantes)
https://x.com/jsoufi/status/1861861110992773311
qui constitue un ensemble particulièrement pertinent pour analyser la position française.
*avocat, qui a travaillé pour l’agence des Nations unies chargée des réfugiés palestiniens au Proche-Orient,
Yael Braun Pivet, elle -même, a indiqué dans une interview à Sud-radio que la France devrait arrêter Netanyahou s’il venait en France https://www.youtube.com/watch?v=Qu6CTN0BPus (entre 10’ et 11’30 ) ….. Mais c’était hier …. avant que le sinistre Barrot ne trouve cet échappatoire dégeulasse de l’immunité (immpunité) …. Dans cet interview, elle indique aussi qu’elle était d’accord avec la transformation du GEVI Palestine en un groupe d’amitié (écouter juste avant dans l’interview)
Pascal Boniface la vidéo
Le Monde 28 nov
Pourquoi la France donne des gages à Benyamin Nétanyahou après le mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale
Dans l'Humanité
« Le premier objectif stratégique d'Israël n’a rien à voir ni avec Gaza, ni avec le Liban, mais avec la Cisjordanie », analyse le diplomate libanais Ghassan Salamé.
Diplomate, professeur émérite en relations internationales à Sciences-Po Paris, l’ancien ministre libanais de passage à Marseille était invité le 23 novembre aux Nouvelles Rencontres d’Averroès pour parler de « Votre Méditerranée ». L’envoyé spécial de l’ONU et spécialiste des relations internationales vient de publier la Tentation de Mars. Guerre et paix au XXIe siècle, aux éditions Fayard, ouvrage dans lequel il présente son analyse des évolutions actuelles du monde.
La Cour pénale internationale (CPI) a émis un mandat d’arrêt contre Benyamin Netanyahou, notamment. Que pensez-vous de sa réaction et de celles d’autres dirigeants politiques et éditorialistes discréditant les institutions internationales ?
On veut détricoter tout ce qu’on a fait en matière de droit international depuis quatre siècles, en particulier au cours du XXe siècle, avec l’accord de La Haye en 1929, les protocoles de Genève en 1949 et les accords plus récents qui ont suivi la fin de la guerre froide. La tradition légale du droit international nous donne une position claire de la part de la Cour internationale de justice (CIJ), qui considère qu’un génocide est plausible.
La CPI a donné des raisons suffisantes pour considérer que des crimes de guerre ont été commis par messieurs Netanyahou et Gallant. Nous avons nos yeux pour voir. Il est très difficile de dire qu’un génocide n’a pas eu lieu à Gaza. Et il est difficile de dire que certaines des méthodes mises en œuvre à Gaza ne sont pas appliquées au Liban et peuvent l’être en Cisjordanie.
La plausibilité de la mise en examen de M. Netanyahou me paraît tout à fait dans l’ordre des choses. Sauf que les États-Unis, l’Allemagne et la Grande-Bretagne ne veulent pas en entendre parler. Certes, ils ont été fort embarrassés, le 22 novembre, lorsque M. Medvedev a dit ne pas reconnaître la CPI. Ils ne pouvaient dénoncer cette déclaration alors que, la veille même, ils s’en prenaient à la CPI et son mandat d’arrêt contre Netanyahou.
Si leur position était dans le sens du droit, ils se seraient levés comme un seul homme, comme ils l’avaient fait à l’égard d’Omar El Béchir, du Soudan, ou du Libyen Mouammar Kadhafi. Ainsi, ils ont perdu un argument. Il y a là une descente en enfer des dirigeants occidentaux au sujet du droit international et du droit humanitaire.
L’indifférence et le mépris à l’endroit des Nations unies peuvent faire beaucoup de mal. L’effet à moyen et long terme sur l’influence occidentale sur le monde est désastreux. Je suis extrêmement inquiet de cette légèreté avec laquelle tous ces pays mettent en cause les règles du droit international qu’ils ont eux-mêmes créées.
Selon vous, que cherche Israël avec son offensive destructrice à Gaza, puis au Liban ?
Les objectifs stratégiques d’Israël sont assez clairs, surtout depuis une quinzaine d’années, depuis que Netanyahou et son équipe sont installés au pouvoir. Le premier, le plus important, n’a rien à voir ni avec Gaza, ni avec le Liban, mais avec la Cisjordanie. Son annexion et son changement de statut juridique, d’où l’expropriation des terres, le harcèlement des populations. Plus de 700 personnes ont été tuées en Cisjordanie pendant que se déroulaient les événements de Gaza.
Vous estimez que l’enjeu du conflit demeure la Cisjordanie. Pourquoi ce territoire est-il si central ?
D’abord, parce qu’il regroupe la part la plus importante du peuple palestinien, plus de 3 millions de personnes. Ensuite et surtout, si cette Cisjordanie était annexée véritablement, il n’y aurait plus aucune chance pour l’émergence d’un État palestinien, donc toute solution à deux États disparaîtrait à jamais. La majorité de la Knesset et je crois une majorité de l’opinion israélienne y sont favorables. Depuis quinze ans, rien n’a été fait pour relancer le processus de paix et la solution à deux États.
Le second objectif est de mettre fin à ce que l’Iran a réussi à construire au cours des trente dernières années dans la région du Croissant fertile, en Irak, en Syrie, au Liban et en Palestine. Des relais démultiplient la puissance de ce pays sur le terrain et le protègent d’une nouvelle attaque pendant qu’il construit son programme nucléaire. Ce scénario iranien est inadmissible pour le gouvernement israélien. Il faut voir l’affaire gazaouie, l’affaire libanaise et ce qui pourrait éclater à n’importe quel moment en Cisjordanie dans le cadre de ces deux objectifs.
Il y a une question de la Palestine qui n’est pas que la question des Palestiniens. Ce conflit doit être résolu pour les droits légitimes du peuple palestinien, mais aussi pour nous tous, pour toute la région et pour l’équilibre mondial. À chaque fois que l’on veut chasser ce conflit, mettre le sujet sous le tapis, il revient à la surface avec plus de violence.
Comment analysez-vous le silence, l’inaction d’une partie du monde ?
Plusieurs facteurs peuvent l’expliquer. Le Hamas et le Hezbollah étant des organisations islamistes pro-iraniennes, cela a facilité le fait qu’une partie de l’opinion internationale se soit détachée. Il y a un courant islamophobe et anti- islamiste, et il y a un courant anti-iranien. Ces deux mouvements, cibles immédiates de la guerre israélienne, sont à la fois islamistes et pro-iraniens. C’est une des causes du désintérêt, voire de la complicité, international.
Le deuxième facteur et pas des moindres est le fait que les gouvernements et la rue arabes ne se sont pas beaucoup manifestés. Donc, quand vous êtes européen ou américain, vous dites : « Si leurs frères arabes sont si peu intéressés à leur sort, pourquoi serais-je plus royaliste que le roi ? »
Enfin, troisième facteur : dans l’esprit occidental, il y a une espèce de panique à l’idée d’être traité d’antisémite. Le gouvernement israélien en a joué intelligemment, de sorte qu’une nouvelle doxa s‘est installée en Occident selon laquelle toute critique du gouvernement israélien est assimilée à de l’antisémitisme. Une telle exception faite à Israël à l’application du droit international et humanitaire va avoir des conséquences désastreuses sur la régulation des conflits dans le monde. Appliquer une exception à la règle détruit la règle.
Dans votre longue carrière de diplomate et de négociateur pour les Nations unies, comment vivez-vous ce moment de l’histoire ?
Pendant que j’écrivais mon livre, la Tentation de Mars, vers la fin de la pandémie de Covid, je me suis mis progressivement à utiliser le présent à la place du futur. J’avais l’impression que l’actualité me précédait. J’y ai exprimé toutes mes inquiétudes face à ce que je constatais en matière de dérégulation de la force qui commençait à devenir endémique un peu partout.
La situation au Moyen Orient m’a obligé à passer du futur au présent. C’est arrivé plus tôt que je le craignais. Nous passons, je crois et je le crains, par une phase de profonde dérégulation. Ce qui arrive avec le discrédit contre la CPI est un chapitre parmi tant d’autres où l’on voit les yeux se fermer face à des violations de plus en plus graves du droit international et du droit international humanitaire.
L’accession de Trump au pouvoir n’arrange pas les choses…
C’est le moins que l’on puisse dire. Il suffit de voir qui a été nommé ambassadeur des États-Unis en Israël : Mike Huckabee, un pasteur évangéliste qui se réfère à la Bible, donc à l’annexion de la Cisjordanie. Marco Rubio, le secrétaire d’État, est un fervent ennemi de l’Iran et de ses relais. Bref, une administration qui ira, encore plus que celle de Biden, dans le sens du gouvernement actuel en Israël. Cela dit, nous allons vers un monde marqué davantage par le rapport de force que par la sécurité collective.
Ces deux concepts ont été en rivalité permanente tout au long du XXe siècle. Nous avons pu penser qu’après la fin de la guerre froide, la logique de la sécurité collective commençait enfin à l’emporter. Mais, aujourd’hui, il n’y a plus de doute. La logique du rapport de force a entièrement marginalisé les efforts de ces trente dernières années pour établir des structures de sécurité collective. On le voit surtout dans la paralysie des organisations internationales.
Le Conseil de sécurité de l’ONU est pratiquement paralysé par le veto des États-Unis sur le Moyen-Orient ou par le veto russe sur l’Ukraine. Et, surtout, ce qui est inquiétant, c’est que la contribution des États aux organisations humanitaires ne cesse de baisser. Aujourd’hui, aucune de ces organisations (Haut-Commissariat aux réfugiés, Programme alimentaire mondial, Organisation internationale pour les migrations…) ne dispose de fonds suffisants face aux besoins créés par cette dérégulation démultipliée à travers le monde.
Quelle issue possible voyez-vous ?
Je ne vois pas d’issue pour le moment. Il y a une possibilité de cessez-le-feu au Liban car un cadre existe déjà : la résolution 1701, adoptée en 2006. Il y a eu une tentative de trêve à laquelle j’étais associé, le 25 septembre dernier. Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, avait donné son accord. Mais il a été tué quelques heures après. Trois semaines plus tard, une autre tentative a également été avortée en raison du refus du premier ministre israélien. Actuellement, nous sommes en train d’aboutir à un accord de cessez-le-feu, au moins à une trêve.
Mais, sur Gaza, on est dans le flou le plus total. Sur la Cisjordanie, nous sommes dans un état de panique que cela s’embrase d’un jour à l’autre. Mais, rappelons qu’il s’agit d’un conflit vieux d’un siècle. Il a pris plusieurs formes, a changé d’acteurs, de couleur, mais il reste le même, bien que le messianisme y ait pris de plus en plus de place, et ferme toute option de compromis.
J’ai bien peur de ne pas être là pour voir sa solution. Je ne suis pas fier du monde que nous laissons à nos enfants. Mais il faut garder espoir. Je suis un pessimiste actif. Il faut continuer à agir en pensant qu’on peut faire quelque chose.
Vous êtes libanais. Comment vivez-vous la destruction du Liban par Israël ? Que ressentez-vous à chaque bombardement ?
C’est atroce. Il y a une chose que j’ai apprise pas seulement au Liban, mais en Birmanie, en Irak, en Libye où j’ai été en poste et lors de mes diverses et nombreuses missions : on ne s’habitue pas à la violence, surtout à la violence aveugle. On ne s’y fait jamais. Je veux bien me confronter à ceux qui disent être insensibles. Moi, la violence m’atteint chaque fois comme si c’était la première fois.
Vous avez été invité, le 23 novembre, par les Nouvelles Rencontres d’Averroès à Marseille pour parler de « Votre Méditerranée ». Des rencontres dont la première édition s’intitule « Méditerranée année zéro ». N’est-on pas plutôt dans une Méditerranée de la fin, agonisante ?
Il y a mille façons de regarder cette mer. D’un point de vue physique, elle subit les crises climatiques et de la biodiversité. La pauvreté de l’apport en eau fraîche est un souci réel. J’ai survolé, l’an dernier, le Pô en Italie, il était pratiquement à sec. Outre les gros intérêts en jeu du secteur des énergies fossiles, comment convaincre sur la question climatique si on n’assure pas déjà la paix et la sécurité.
Une autre façon de regarder la Méditerranée est de la considérer comme le principal couloir de l’émigration vers l’Europe et, de ce point de vue, la Méditerranée est un cimetière, elle devient mortelle comme lieu de passage. Je l’ai beaucoup vu lorsque j’étais en Libye. J’ai vu des corps flottants, des personnes ayant perdu leurs proches et pris des risques dire leur détermination à retraverser la mer.
Les Européens ne gèrent pas cette question de manière à la fois efficace et humaniste. Ils font des petits accords minables avec les pays du Sud pour acheter leur coopération, cela alors que le phénomène va s’aggraver. Enfin, la Méditerranée est aussi une zone de conflits. Il y a ce qui se passe au Proche-Orient, mais aussi la crainte que des conflits larvés ne se réveillent, je pense à Chypre, notamment. Le contentieux gréco-turc n’est toujours pas résolu.
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Qui a dit à votre avis « Chaque État partie au Statut de Rome a l’obligation de coopérer avec la Cour pénale internationale et d’exécuter les mandats d’arrêt émis par celle-ci, en application des dispositions pertinentes du Statut de Rome. » ?
Réponse : La France, le 2 Septembre 2024 suite à la visite de Poutine en Mongolie. C'était avant qu'elle ne se couche devant Netanyahou.
https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/justice-internationale/evenements/article/q-r-extrait-du-point-de-presse-02-09-24