En faisant l’apologie du génocide, Haïm Korsia met les Juif·ves en danger
Nous avons pris connaissance avec effroi des propos tenus par Haïm Korsia, grand rabbin de France, sur les antennes de BFM TV ce lundi 26 août en réaction à la tentative d’incendie de la synagogue de la Grande Motte survenue le samedi 24 août. Dans un premier temps, il impute à la France Insoumise la montée des actes antisémites, notamment le viol de la jeune fille de Courbevoie survenu en juin dernier : pour s’assurer le vote de nos concitoyen.nes musulman.es jugé.es antisémites par essence, LFI distillerait la haine des Juif.ves. Ses militant.es se voient de ce fait qualifié.es de “gueux excitant des sots”. Ces propos racistes constituent une insulte grave pour nos compatriotes musulman.es et contribuent à rendre plus difficile encore le dialogue judéo-musulman, déjà largement affaibli depuis le 7 octobre. En tenant de tels propos, Haïm Korsia ne participe aucunement à lutter contre l’antisémitisme, bien au contraire.
Plus grave encore, Haïm Korsia se lance ensuite dans une véritable diatribe génocidaire : il qualifie les massacres à Gaza de “faits de guerre qui incombent au Hamas”, et affirme qu’ils ne seraient “pas du même ordre” que ceux commis le 7 octobre. Cette manière d’affirmer que les plusieurs centaines de milliers de victimes palestiniennes seraient d’une importance moindre que les 1200 morts israéliens dûs à l’attaque du Hamas relève d’une rhétorique raciste, qui fait des vies palestiniennes quantité négligeable. Dans la suite de son interview, relayant la propagande de Tsahal, Haïm Korsia fait du Hamas le seul obstacle à la libération des otages, bien que les refus successifs opposés par Netanyahou aux différents accords proposés par Washington et acceptés par les dirigeants du Hamas aient été largement documentés. La poursuite de la guerre lui permettant de se maintenir au pouvoir, le Premier ministre israélien constitue aujourd’hui le principal obstacle au retour sain et sauf des otages.
Mais leur survie intéresse manifestement moins les apologistes de Tsahal que la mort des Palestinien.nes. Haïm Korsia va en effet jusqu’à exhorter l’armée israélienne à “finir le boulot”. Cette formule, directement reprise de Nétanyahou, exprime on ne peut plus clairement le fantasme d’extermination qui motive le génocide en cours. Cette prise de position est d’autant plus irresponsable que toutes les agressions à caractère antisémite survenues ces derniers mois ont été motivées par la situation génocidaire à Gaza. En agissant de la sorte, Haïm Korsia nous met toutes et tous en danger, nous les Juifs et Juives de France. Plus que toute autre institution, le grand rabbin de France est en effet le principal représentant de la foi juive aux yeux du grand public. En associant aussi clairement judaïsme et défense inconditionnelle d’Israël, il nous rend aux yeux de tous.tes complices des crimes contre l’humanité perpétrés par Tsahal, reprenant en cela un amalgame grossier savamment entretenu par l’Etat français et les instances de représentation du judaïsme en France.
Dans une lettre ouverte publiée sur le site de l’UJFP en mai dernier, l’imam Noureddine Aoussat déplorait le silence des rabbins et en particulier de Haïm Korsia vis-à-vis des massacres commis à Gaza depuis le 7 octobre, silence qui s’est depuis mué en blanc-seing. Nous partageons sa colère, et la comprenons d’autant mieux que ce sont les valeurs du Talmud que nous chérissons qui sont bafouées ici par Haïm Korsia. Alors que nos sages nous ont appris le pouvoir des mots et la méfiance vis-à-vis des puissants, celui qui a été choisi pour en être le représentant a bafoué toute notre tradition, et par ses propos, condamne toute notre communauté. L’attitude irresponsable adoptée par les institutions juives de France tranche avec la grande dignité des prises de positions de religieux.ses juif.ves à travers le monde qui, à l‘instar de la rabbin Lynn Gottlieb aux Etats-Unis, dénoncent sans relâche le génocide et sont en première ligne pour faire pression sur leurs gouvernements afin qu’il y soit mis fin.
Lorsque le grand rabbin de France se félicite de la manière avec laquelle Israël mène ses offensives à Gaza – disant ne pas avoir à en “rougir” alors même que son armée perpétue un génocide –, il fait monter l’antisémitisme. Lorsque l’Union des Etudiants Juifs Français organise pour ses université d’été un road trip entre Tel Aviv et Jérusalem, profitant des plages israéliennes alors même que le génocide fait rage à quelques dizaines de kilomètres, l’UEJF fait monter l’antisémitisme. Lorsque le Conseil représentatif des institutions juives de France reçoit en grande pompe le président israélien Isaac Herzog – criminel de guerre ayant apposé sa signature sur les bombes qui tuent les femmes et les enfants palestinien.nes et ayant affirmé qu’il n’y a “pas d’innocents à Gaza” –, lorsqu’il inscrit dans ses principales missions l’expression d’une “solidarité pleine et entière avec l’Etat d’Israel” et “défend inconditionnellement l’Etat juif”, le CRIF fait monter l’antisémitisme.
Différents signalements au procureur et dépôts de plaintes ont été relayés sur les réseaux sociaux. Pour la sécurité des Juif.ves de France comme pour la lutte pour le cessez-le-feu à Gaza que nous menons depuis maintenant 10 mois, les propos de Haïm Korsia doivent être sanctionnés. Nous ne le savons que trop bien : rien ne nourrit davantage le ressentiment contre les Juif.ves que le spectacle délétère du deux-poids/deux-mesures dont bénéficient les soutiens du régime criminel israélien. La fin de l’impunité d’Israël comme de ses soutiens est un impératif de justice absolu, d’abord et avant tout pour les Palestinien.nes, mais aussi pour les Juif.ves du monde entier que ses crimes mettent en danger.